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La chasse sous l'Ancien Régime, un privilège de la noblesse
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- Publié le vendredi 11 avril 2014 09:44
- Écrit par Admin
En préambule, je voudrais préciser que cet article a pour but d'évoquer l'histoire de la chasse en France, au Moyen Age et sous l'Ancien Régime. Il ne s'agit en aucun cas d'une apologie (ou d'une critique) de la chasse.
Comme vous le savez sans doute, la tradition de la chasse est associée à l'aristocratie. Au Moyen Age, c'était un privilège de la noblesse et des dignitaires de l'État et du clergé. Ainsi, la chasse au grand gibier était une prérogative de nobles et le petit gibier (lièvres, volatiles) était destiné au reste de la population. Certaines zones étaient réservées aux chasses royales : ce sont les capitaineries de chasse, créées sous François Ier.
Un privilège de nobles
Pendant tout le Moyen Age et l'Ancien Régime, la chasse est une distraction de gentilhomme et un privilège seigneurial. Les rois sont de grands chasseurs. Être admis aux chasses royales est un des plus grands honneurs de la cour. Louis XV et Louis XVI étaient tous deux de grands passionnés de chasse. Cette activité leur permettait d'échapper aux pesanteurs de la cour et du protocole que tous deux abhorraient. Louis XVI, dans son journal, évoque ses parties de chasse. A la date du 14 juillet 1789, lorsqu'il y écrit le simple mot : "Rien", beaucoup y voient à tort le signe de son désintérêt face aux événements révolutionnaires, alors qu'il signifie en fait qu'il ne s'est rien passé de notable à la chasse du jour (ou qu'il n'a rien pris). De nombreux autres « Rien » ou « Rien du tout » parsèment son journal, signifiant que le roi n’avait fait aucune prise de gibier ou n’avait pas participé à un événement lié à ses obligations (voyage, cérémonie...).
Le seigneur haut-justicier dispose du droit de chasse dans l'étendue de sa haute-justice, le seigneur local dans sa seigneurie. Les roturiers n'ont pas ce droit sauf s'ils ont acheté un fief, une seigneurie ou une haute-justice. Les braconniers sont sévèrement punis : amende et fouet pour la première infraction, fouet et bannissement pour la première récidive, galères et confiscation des biens à la seconde récidive, peine de mort en cas de troisième récidive (qui sera supprimée par une ordonnance de 1669).
Un loisir coûteux
La chasse est une distraction onéreuse car elle nécessite de grands équipages : animaux et personnel. Il existe deux types de chasses : la vènerie, réservée aux hommes et la volerie, ouverte aux femmes.
La vènerie, ou chasse à courre, est organisée dans les forêts entourant le logis seigneurial. Pratiquée à cheval, elle consiste à traquer un animal à l'aide d'une meute de chiens. Seuls les hommes la pratiquent, car elle est réputée agressive. Les gibiers recherchés sont les sangliers, les lièvres et les biches, l'animal le plus prisé étant le cerf.
La volerie est une chasse moins éprouvante, considérée comme plus adaptée aux femmes. Elle se pratique avec des rapaces dressés pour traquer du gibier à plumes comme le faisan, le héron ou la grue.
En raison de son coût et des prérogatives du seigneur qui chasse sur ses terres, la chasse est un facteur de distinction sociale. La chasse permet aux nobles d'afficher leur rang et leur statut, tout en gardant le contrôle sur leurs forêts en surveillant les paysans qui y braconnent. Le droit de chasse est un des plus haïs par les paysans...
C’est avec la Révolution française que la liberté de chasser voit le jour et que la chasse se démocratise. La chasse est alors pratiquée à-tout-va et sans règles, décimant de nombreuses espèces. C'est l'avènement de Napoléon Ier qui y met un terme en réglementant la chasse. Napoléon n’était pas un grand chasseur et ne participait aux chasses que par obligation et non par affection pour ce loisir. Diverses lois sont mises en place durant tout le XIXe pour encadrer cette pratique. A partir de 1975, il n’est plus possible de chasser en France qu’avec la délivrance d’un permis de chasser obtenu après examen.
Depuis le Moyen Age, la chasse a toujours nourri les passions et les rancœurs, entre ceux qui disposaient du droit de chasser et ceux qui en étaient privés. Aujourd'hui, le débat est toujours vivace, entre ses défenseurs qui louent son côté traditionnel, en accord avec la nature, et ses détracteurs qui déplorent, entre autres, sa barbarie.
Source :
Jacques Paviot, Tournois et chasse : des sports nobles, Historia thématique "La vie de château", n°100, 2006
Image :
Plaque représentant les chasses de Louis XVI.
Description : Le cerf passe l'Oise du côté de Royallieu, en vue de la ville de Compiègne (en présence de Marie-Antoinette assistant au spectacle debout sur le toit d'un bateau chargé des membres de sa famille).
Auteur : Oudry Jean Baptiste (1686-1755) (d'après), Pithou Nicolas-Pierre, l'Aîné (actif de 1757 à 1790)
Crédit photographique : (C) RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Gérard Blot
Date : 1779